Aux termes de deux arrêts du 8 avril 2021 (n°19-23.728 et 20-11.126), la Cour de cassation a affirmé que « si la mise en œuvre de la solidarité financière du donneur d’ordre n’est pas subordonnée à la communication préalable à ce dernier du procès-verbal pour délit de travail dissimulé, établi à l’encontre du cocontractant, l’organisme de recouvrement est tenu de produire ce procès-verbal devant la juridiction de sécurité sociale en cas de contestation par le donneur d’ordre de l’existence ou du contenu de ce document ».
Conformément à l’article L.8222-2 du code du travail, le donneur d’ordre qui méconnait les obligations de vigilance énoncées à l’article L.8222-1 du même code est tenu solidairement au paiement des cotisations obligatoires, pénalités et majorations dues par son sous-traitant qui a fait l’objet d’un procès-verbal pour délit de travail dissimulé.
Il résulte, par ailleurs, de la jurisprudence que la mise en œuvre de la solidarité à laquelle est tenu le donneur d’ordre est subordonnée à l’établissement d’un procès-verbal pour délit de travail dissimulé à l’encontre du cocontractant (Cass. 2e civ. 26 novembre 2015, n°14-23.851 ; Cass. 2e civ. 26 mai 2016, n°15-17.556 ; Cass. 2e civ. 21 décembre 2017, n°16-23.672).
Dans chacune de ces affaires, une société a reçu une lettre d’observations l’avisant de la mise en œuvre de la solidarité financière prévue par l’article L.8222-2 du code du travail et du montant des cotisations estimées dues, en suite d’un procès-verbal de travail dissimulé établi à l’encontre de l’un de ses cocontractants avant de saisir la juridiction de sécurité sociale.
Devant la juridiction de sécurité sociale, l’URSSAF ne produisait pas le procès-verbal de constat d’une infraction de travail dissimulé concernant la société cocontractante, de sorte que les juges n’ont pas été en mesure de vérifier que la société en cause avait effectivement fait l’objet d’un procès-verbal pour délit de travail dissimulé.
Dans ces deux arrêts, la Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir déduit que « faute pour l’URSSAF d’avoir produit devant la juridiction de sécurité sociale le procès-verbal de constat de travail dissimulé à l’encontre du sous-traitant, elle n’était pas fondée à mettre en œuvre la solidarité financière ».
Cette solution, de nature à garantir la sécurité juridique du cotisant et le respect des droits de la défense, constitue un revirement de jurisprudence.
La Haute juridiction jugeait en effet, encore récemment, que la mise en œuvre de la solidarité financière supposait uniquement que le donneur d’ordre ou le maître d’ouvrage ait été valablement informé des causes, des périodes, des bases, ainsi que du montant du redressement par l’envoi de la lettre d’observations, sans que les agents de contrôle ne soient tenus de lui adresser le procès-verbal constatant le délit. (Cass. 2e civ. 17 janvier 2008, n°06-20.594 ; Cass. 2e civ. 13 octobre 2011, n°10-19.389 ; Cass. 2e civ. 16 juin 2011, n°10-21.170 ; Cass. 2e civ. 28 mai 2020, n°19-14.862 ; Cass. 2e civ. 28 mai 2020, n°19-14.863).