Le télétravail est une forme d’organisation du travail de plus en plus répandue, notamment depuis la pandémie du Covid19.
Selon l’article L. 1222-9 du code du travail, le télétravail “désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication“.
Cette forme d’organisation du travail soulève de nombreuses questions, notamment lorsqu’il est pratiqué à l’étranger.
Tout d’abord, se pose la question de la loi applicable au contrat de travail lorsque le salarié télétravaille à l’étranger :
- En principe, les parties choisissent la loi applicable au contrat, en application du Règlement Européen n°593/2008, dit “Rome 1” ;
- Toutefois, ce choix ne peut avoir pour effet de priver le salarié du niveau de protection minimale que lui aurait offert la loi impérative applicable à défaut de choix, c’est-à-dire de la loi applicable au lieu habituel de travail du salarié. Ainsi, si le salarié télétravaille de manière permanente depuis son domicile à l’étranger et se rend seulement ponctuellement au bureau en France, la France ne sera pas considérée comme son lieu de travail habituel. Dans ce cas, à défaut de choix exprimé sur la loi applicable, il se verra appliquer la loi du pays au sein duquel il télétravaille.
S’agissant ensuite des règles de sécurité sociale applicables, en principe, le régime français ne s’applique pas aux personnes exerçant leur activité hors de France (CSS, art. L. 111-2-2). Deux principes gouvernent la loi de sécurité sociale applicable :
- le principe de la territorialité selon lequel la loi applicable est celle du lieu d’exercice de l’activité ;
- le principe de l’unicité selon lequel la loi d’un seul Etat doit être appliquée.
Concrètement, en cas de télétravail pérenne et permanent à l’étranger, l’employeur devra effectuer les démarches nécessaires pour affilier le salarié au régime de sécurité sociale local, peu important la loi applicable en matière de droit du travail. En outre, lorsque le salarié télétravaille, pour partie, dans un État membre où il réside, et est occupé simultanément dans un ou plusieurs autres États membres, il sera soumis au régime de sécurité sociale de son État de résidence s’il y exerce une partie substantielle de ses activités, à savoir au moins 25 %.
Enfin, dans une instruction publiée au Bulletin Officiel Santé-Protection sociale-Solidarité le 16 octobre 2023, la Direction de la sécurité sociale a précisé les modalités de traitement des situations de télétravail des travailleurs transfrontaliers.
Pour rappel, un accord-cadre européen sur le sujet signé par la France a pris effet le 1er juillet 2023, pour une durée de 5 ans. Cet accord permet de maintenir la législation de sécurité sociale de l’État dans lequel l’employeur a son siège social ou son siège d’exploitation pour les salariés transfrontaliers qui télétravaillent moins de50 % de leur temps de travail total dans leur Etat de résidence, par dérogation au taux de 25 % prévu par les règlements européens.
Pour pouvoir appliquer l’accord-cadre dérogatoire, il faut remplir 3 conditions :
- être travailleur salarié (sont exclus les indépendants) ;
- exercer son activité uniquement sur le territoire de deux Etats signataires (dont la liste est tenue à jour par les autorité belges), en télétravail dans son Etat de résidence et en présentiel dans l’Etat où le(s) employeur(s) ou entreprise(s) ont leur(s) siège(s) social(aux) ou siège(s) d’exploitation ;
- être en situation de télétravail transfrontalier habituel.
L’instruction apporte une précision concernant la répartition des périodes de télétravail et des périodes de présentiel sur la période de référence de 12 mois civils, en indiquant que « l’accord est susceptible de s’appliquer tant aux travailleurs exerçant leur activité à raison de deux jours de télétravail par semaine, qu’aux travailleurs exerçant leur activité en télétravail plusieurs semaines ou mois d’affilée, dès lors que la pratique de l’activité en télétravail reste inférieure à 50 % du temps de travail sur 12 mois ».
(Instr. intermin. no DSS/DACI/2023/155, 27 sept. 2023, pages 31-40).
https://sante.gouv.fr/fichiers/bo/2023/2023.19.sante.pdf#page=31