Par ordonnance rendue le 14 février dernier, le juge des référés de Nanterre a fait droit à la demande d’un CSE de voir suspendre le déploiement de nouvelles applications informatiques mettant en œuvre des procédés d’intelligence artificielle jusqu’à l’achèvement de sa consultation.
Dans cette affaire, le CSE considérait que les nouvelles applications informatiques avaient été mises en œuvre sans attendre son avis, ce qui constituait un trouble manifestement illicite et une entrave à ses prérogatives.
L’employeur soutenait, pour sa part, que les outils informatiques litigieux étaient en cours d’expérimentation et non encore mis en œuvre.
Le juge des référés du Tribunal judiciaire de Nanterre a considéré que la phase pilote impliquait néanmoins l’utilisation des nouveaux logiciels, au moins partiellement par l’ensemble des salariés concernés. Selon le Tribunal « cette phase ne peut dès lors être regardée comme une simple expérimentation nécessaire à la présentation d’un projet suffisamment abouti, mais s’analyse au contraire comme une première mise en œuvre des applicatifs informatiques soumis à consultation. Or, il est constant que le comité n’a pas encore rendu son avis sur ces outils. Leur déploiement anticipé constitue dès lors un trouble manifestement illicite »
Rappelons que, selon l’article L. 2312-8 du Code du travail, le CSE doit être consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise et notamment sur l’introduction de nouvelles technologies. Selon une jurisprudence bien établie, la consultation du CSE s’impose si la mesure envisagée intéresse l’organisation, la gestion ou la marche de l’entreprise et revêt une certaine importance. Cette consultation doit, pour avoir un effet utile, intervenir avant la mise en œuvre du projet.
Il convient de relever l’existence d’autres décisions, rendues notamment par la chambre criminelle de la Cour de cassation, qui ont considéré que l’introduction d’un nouveau logiciel ne constituait pas un projet important imposant la consultation du comité (Cass. crim., 3 mai 1994 n°93-80.911 ; Cass. crim., 13 septembre 2005 n°04-86.887).
A voir donc si l’ordonnance du Tribunal judiciaire de Nanterre sera contestée et, éventuellement, infirmée.