La crise sanitaire du COVID-19 s’est doublée d’une crise économique sans précédent qui a d’ores et déjà induit une augmentation sensible du recours par les entreprises aux procédures collectives et principalement au redressement et à la liquidation judiciaire.
Outre qu’elle permet la mise en œuvre d’un plan de réduction des effectifs de façon rapide (les délais de consultation du CSE ainsi que les conditions de mise en œuvre du plan étant en effet fortement aménagés), la procédure collective offre également un cadre sécurisant pour la notification des licenciements pour motif économique.
A ce titre, il est constant que lorsque la rupture du contrat de travail intervient sur ordonnance du Tribunal de commerce, le caractère économique du motif de licenciement devient particulièrement difficile à contester pour les salariés (en ce sens, voir Cass. Soc., 10 juill. 2002, n° 00-42.340 ; Cass. Soc., 10 mai 2005, n° 03-40.624). Les risques de condamnation de l’employeur au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sont ainsi très limités.
L’employeur doit néanmoins rester vigilant :
- Il reste assujetti à une obligation préalable de reclassement, tout manquement à cette obligation pouvant justifier un contentieux prud’homale et, le cas échéant, l’octroi d’indemnités (Cass. Soc., 8 juin 1999, n° 96-44.811),
- Lorsque l’administrateur procède au licenciement d’un salarié d’une entreprise en redressement judiciaire, la lettre de licenciement doit comporter le visa de l’ordonnance du juge-commissaire autorisant le licenciement, faute de quoi le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse (Cass. Soc., 27 mai 2020, n° 18-20.153) ;
- Surtout, le salarié reste recevable à contester la cause économique de son licenciement s’il prouve que l’autorisation du juge-commissaire a été obtenue par fraude (Cass. Soc., 4 juill. 2018, n° 16-27.922) ou que la liquidation judiciaire à l’origine de la cessation d’activité résulte d’une faute de l’employeur (Cass. Soc., 8 juill. 2020, n ° 18-26.140).
Dans cette dernière jurisprudence (Cass. Soc., 8 juill. 2020, n ° 18-26.140), une salariée avait été licenciée pour motif économique en raison de la liquidation judiciaire de l’entreprise impliquant la cessation de l’activité de cette dernière. Ultérieurement, le gérant de la Société avait été condamné par le Tribunal de Grande Instance – devenu le Tribunal judiciaire – en raison d’un défaut de déclaration d’état de cessation des paiements ainsi que d’un détournement d’actif.
La salariée avait alors contesté son licenciement au motif que la cessation d’activité résultait d’une faute ou d’une légèreté blâmable de l’employeur. Après avoir rappelé que la faute de l’employeur à l’origine de la cessation d’activité était de nature à priver le licenciement de cause réelle et sérieuse, la Cour de cassation constate en l’espèce que le « défaut de déclaration de l’état de cessation des paiements et le détournement d’actif commis postérieurement à l’ouverture de la procédure collective n’étaient pas à l’origine de la liquidation judiciaire ».
Les employeurs doivent ainsi être attentifs aux actes réalisés en amont de l’ouverture d’une procédure collective, une gestion hasardeuse de l’activité sur cette période pouvant le cas échéant offrir un motif de contestation de la licéité de leur licenciement par les salariés.