Aux termes d’un arrêt du 22 mai 2024 (n°22-22.321), la Cour de cassation a affirmé la possibilité pour le juge, en cas de recours contre un avis d’inaptitude, de confier la mesure d’instruction de nature à l’éclairer sur les éléments de nature médicale du dossier, à un autre médecin que le médecin inspecteur du travail.
En l’espèce, un salarié a été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail, dont l’avis précisait que l’état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans l’emploi. Le salarié a saisi la juridiction prud’homale d’une contestation de cet avis d’inaptitude, selon la procédure accélérée au fond.
Le Conseil de prud’hommes a alors confié à un médecin inspecteur régional du travail une mesure d’instruction. Ce dernier n’étant pas disponible et face au refus de plusieurs médecins inspecteurs du travail de prendre en charge la mesure d’instruction, le Conseil de prud’hommes l’a finalement confiée à un médecin inscrit sur la liste des experts près la cour d’appel.
Ce dernier a donné raison au salarié, concluant que les éléments de nature médicale ne justifiaient pas l’avis d’inaptitude à tout poste dans l’entreprise.
Devant la Cour d’appel, l’employeur a sollicité la nullité de la mesure d’instruction en soutenant que seul le médecin inspecteur du travail était spécifiquement habilité par les textes. La Cour d’appel a cependant rejeté sa demande.
A juste titre, selon la Cour de cassation qui, aux termes d’un arrêt du 22 mai 2024 (n°22-22.321), a affirmé le principe selon lequel :
« à l’occasion d’une mesure d’instruction ordonnée sur le fondement de l’article L. 4624-7 du code du travail, le juge qui constate qu’aucun médecin inspecteur du travail n’est disponible pour réaliser la mesure d’instruction peut désigner un autre médecin pour permettre son exécution ».
La Haute juridiction se fonde sur l’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme qui garantit le droit à être jugé dans un délai raisonnable.
En l’espèce, l’indisponibilité des médecins inspecteurs du travail était caractérisée dès lors que :
– le premier juge avait désigné un médecin inspecteur du travail régionalement compétent ;
– le conseil de prud’hommes n’avait trouvé aucun médecin inspecteur du travail acceptant la mesure d’instruction et s’était heurté au refus de tous les médecins inspecteurs du travail recherchés.
Par conséquent, un autre médecin pouvait parfaitement être désigné.
La Cour de cassation semble ainsi prendre en considération les difficultés pratiques liées au sous-effectif de médecins inspecteurs du travail pour répondre aux demandes d’expertise des juges prud’homaux.