Dans un arrêt du 10 juillet 2024 (n°23-17.953), la Cour de cassation rappelle le risque de nullité du licenciement du licenciement du salarié qui témoigne et agit en justice.
En l’espèce, un salarié qui occupait le poste de Directeur commercial a été licencié pour faute grave pour avoir établi un témoignage en faveur d’une ancienne salariée de la société dans le cadre d’un litige prud’homal opposant la société à cette dernière portant sur le bienfondé de son licenciement pour motif économique et dans le cadre du témoignage, mis en cause les agissements du groupe et d’avoir ainsi commis un manquement à ses obligations contractuelles.
Contestant le bienfondé de son licenciement, le salarié soutenait notamment qu’en vertu des articles 6 et 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, de l’article 10 du code civil et de la jurisprudence de la Cour de cassation, il ne pouvait être sanctionné pour avoir témoigné en justice, sauf à prouver que ce témoignage reposerait sur des faits inexacts.
Les juges du fond ont jugé que le licenciement était fondé sur une faute grave au motif que la Société ne reprochait pas à son salarié d’avoir témoigné contre elle à l’occasion d’un litige prud’homal mais d’avoir, par ce témoignage, manqué à son obligation de confidentialité.
Ils ont souligné que « le salarié apportait des éléments concernant la commercialisation d’une plante par son employeur, les conditions dans lesquelles il a pu ou non procéder à des recherches et études de marché concernant cette commercialisation et les coûts en recherche et développement préalables à la commercialisation, tout en y ajoutant un jugement de valeur personnel aux fins de discréditer la gestion de l’entreprise ».
Ils ont également relevé que « la lettre de licenciement reprochait à l’intéressé d’avoir confié à un avocat la charge d’entamer une procédure afin d’évincer les dirigeants de la société et d’avoir sollicité des membres de leur famille pour qu’ils se joignent à la procédure […] qu’un tel comportement marque la défiance du salarié envers les dirigeants de la société qui l’emploie et caractérise un comportement déloyal vis-à-vis de son employeur ».
Ce raisonnement est censuré par la Cour de cassation.
Aux termes d’un arrêt du 10 juillet 2024 (n°23-17.953), la Cour de cassation a jugé qu’ « en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que le salarié avait été licencié pour avoir établi un témoignage en faveur d’une autre salariée dans le cadre d’un litige prud’homal opposant la société à cette dernière, par des motifs impropres à caractériser la mauvaise foi du salarié, la cour d’appel a violé l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ».
La Cour de cassation rappelle qu’au regard de l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :
– le licenciement prononcé en raison du contenu d’une attestation délivrée par un salarié dans le cadre d’une instance judiciaire, est atteint de nullité, sauf en cas de mauvaise foi de son auteur ;
– Est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale le licenciement intervenu en raison d’une action en justice introduite par le salarié.
La Haute juridiction confirme ainsi sa jurisprudence. Elle a, en effet, déjà jugé par le passé qu’en raison de l’atteinte qu’il portait à la liberté fondamentale de témoigner, garantie d’une bonne justice, le licenciement prononcé en raison du contenu d’une attestation délivrée par un salarié au bénéfice d’un autre était atteint de nullité, sauf en cas de mauvaise foi de son auteur (notamment Cass. soc. 29 octobre 2013, n°12-22.447).