Depuis un arrêt de principe rendu le 3 novembre 2016 (Cass. soc. 3 novembre 2016, n°15-18444), la Cour de cassation a étendu la présomption de justification d’une différence de traitement applicable aux avantages catégoriels, aux avantages réservés par la voie d’accord d’établissement, aux seuls salariés d’un établissement.
Ainsi, la Haute Cour rappelle qu’il existe une présomption de justification aux différences de traitement instaurées entre salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, opérées par voie d’accords d’établissement négociés et signés par des organisations syndicales représentatives au sein de ces établissements, investies de la défense des droits et intérêts des salariés de l’établissement et à l’habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote.
Toutefois, cette présomption peut être combattue par celui qui conteste cette différence de traitement dès lors qu’il démontre que les avantages conventionnels sont étrangers à des considérations de nature professionnelles.
Par deux arrêts en date du 28 septembre 2022 (n°21-15356 et n°20-23510), rendus dans des espèces différentes, la Cour de cassation n’a pas manqué de rappeler ces solutions.
Dans le 1er arrêt (n°21-15356), l’employeur avait été condamné par la Cour d’appel à payer diverses sommes au salarié à titre de rappel de prime panier.
Pour entrer en voie de condamnation, la Cour d’appel avait considéré que l’accord d’établissement entérinant le principe d’une prime panier exceptionnelle accordée exclusivement aux salariés affectés à un établissement X était de nature à justifier les différences de traitement entre salariés appartenant à la même entreprise mais affectés à des établissements distincts, de sorte qu’il appartenait à la salariée concernée de démontrer que ces différences de traitement étaient étrangères à toute considération de nature professionnelle.
Le juge d’appel avait retenu que la prime panier attribuée aux salariés de l’établissement X était perçue de façon forfaitaire et identique quel que soit leur lieu d’habitation, que cette prime n’était pas versée en fonction de la distance séparant le domicile des salariés de leur lieu de travail les empêchant de rentrer déjeuner chez eux, et que le coût des repas sur place pouvait être variable, ce qui ne constituait pas une raison objective d’attribution de la prime.
La Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel en rappelant que l’accord d’établissement instaurant cet avantage permettait de présumer que les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise mais affectés à des établissements distincts étaient justifiés, de sorte que le juge d’appel avait violé le principe susvisé.
Dans le 2nd arrêt, l’employeur avait été également condamné par la Cour d’appel au paiement cette fois-ci d’une prime de fin d’année, d’une prime de trajet et d’une prime de panier à un salarié.
La Cour d’appel avait considéré que le salarié démontrait que l’attribution de ces différentes primes accordées aux salariés appartenant à la même entreprise, mais rattachés à un établissement distinct, avantages instaurés par voie d’accord d’établissement, n’étaient pas justifiées par des raisons objectives.
La Haute Cour casse l’arrêt d’appel et rappelle que la présomption de justification ne peut tomber que lorsque celui qui la conteste rapporte la preuve que l’avantage litigieux est étranger à toute considération de nature professionnelle.