Dans un arrêt en date du 7 mai 2024 publié au Bulletin, la Cour de cassation s’est prononcée sur le point de départ du délai de prescription de l’action en paiement des salaires dont le versement doit être repris par l’employeur à partir de l’expiration du délai d’un mois suivant la déclaration d’inaptitude.
En l’espèce, une salariée, déclarée inapte à son emploi le 3 juillet 2012, avait saisi la Juridiction prud’homale le 3 novembre 2017 d’une action tendant notamment à obtenir le paiement des salaires d’août 2012 à septembre 2013.
La Cour d’appel, saisie du litige, avait déclaré son action prescrite en retenant que le délai de prescription de trois ans applicable en matière salariale avait commencé à courrier le 3 août 2012, soit à la date à laquelle la reprise du salaire devait intervenir, de sorte qu’elle aurait dû introduire son action avant le 3 août 2015.
A tort, selon la Cour de cassation.
Au visa de l’article L. 1226-4 du Code du travail relatif à la reprise du paiement du salaire, de l’article L. 3245-1 du Code du travail relatif au délai de prescription triennal applicable en matière salariale et de l’article L. 3242-1 afférent au paiement mensuel du salaire, la Cour de cassation énonce qu’ « il résulte de la combinaison des articles L. 3245-1 et L. 3242-1 du code du travail que le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible. Pour les salariés payés au mois, la date d’exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise et concerne l’intégralité du salaire afférent au mois considéré ».
Elle en déduit qu’en retenant comme point de départ du délai de prescription de trois ans la date de la reprise du salaire et non pas la date d’exigibilité de chaque salaire mensuel, la Cour d’appel a violé les textes susvisés, dès lors que “le délai de prescription de l’action en paiement des salaires dont le versement doit être repris par l’employeur à partir de l’expiration du délai d’un mois suivant la déclaration d’inaptitude, dans les conditions fixées à l’article L. 1226-4, court à compter de la date d’exigibilité de chacune des créances de salaire dues jusqu’à la rupture du contrat de travail“.
Cette solution est conforme à sa position antérieure, la Cour de cassation ayant eu l’occasion de préciser auparavant que le point de départ de la prescription est la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible (Cass. soc., 24 avr. 2013, n°12-10.196) et que, pour les salariés soumis à la mensualisation, la date d’exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise et concerne l’intégralité du salaire afférent au moins considéré (Cass. soc., 14 nov. 2013, n°12-17.409).
On conçoit néanmoins la position de la Cour d’appel dont l’arrêt est cassé et qui tendait à considérer que le salarié avait connaissance des faits lui permettant d’exercer son action, dès l’expiration du délai d’un mois suivant son avis d’inaptitude lui ouvrant droit à la reprise du paiement de son salaire.