Dans un arrêt du 15 septembre 2020, la Cour d’appel de CHAMBERY considère que les dispositions de l’article L. 1235‐3 du Code du travail sont « compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention n°158 de l’Organisation internationale du travail » et « ne contreviennent pas à l’article 26 du Pacte relatif aux droits civils et politiques ».
En l’espèce, la salariée licenciée soutenait que le barème d’indemnités fixé à l’article L. 1235-3 du Code du travail serait « en contradiction avec plusieurs normes internationales et notamment l’article 10 de la Convention nº158 de l’Organisation internationale du travail (OIT) et l’article 24 de la Charte sociale européenne telle qu’interprétée par le Comité européen des droits sociaux ».
De façon plus étonnante, elle se prévalait également des dispositions de l’article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifié par la France interdisant toute discrimination devant la loi. Selon la salariée, le barème « Macron » lui serait contraire en ce qu’il « instaure, en fonction du seuil d’effectif de l’entreprise à laquelle les salariés appartiennent une discrimination par rapport aux salariés licenciés abusivement justifiant d’une ancienneté équivalente mais appartenant à une entreprise occupant habituellement moins de onze salariés ».
La Cour d’appel de CHAMBERY a écarté ces deux arguments, dans une réponse structurée en trois étapes :
1) Les juges ont rappelé l’absence d’effet direct de la Charte sociale européenne et des décisions du Comité européen des droits sociaux en droit interne dans un litige entre particuliers, considérant qu’elles ne pouvaient être utilement invoquées.
2) La Cour d’appel a jugé que le contrôle de conventionnalité par rapport à l’article 10 de la Convention n°158 de l’OIT implique une « appréciation du système d’indemnisation dans son ensemble ».
Elle retient ainsi que :
o « le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien des avantages acquis et que ce n’est que lorsque la réintégration est refusée par l’une ou l’autre des parties que le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur » ;
o « le plafonnement de cette indemnité n’est pas, en soi, contraire au texte conventionnel »;
o « le barème prévu, quelle qu’ appréciation que l’on puisse porter sur la faiblesse des plafonds concernant les salariés ayant une ancienneté réduite, est conçu sur la base de critères objectifs tenant à l’ancienneté et à la rémunération mensuelle du salarié, le juge disposant d’une marge d’appréciation (s’élevant avec l’ancienneté), lui permettant de tenir compte d’autres facteurs relatifs à la situation personnelle du salarié » ;
o « l’indemnité prévue par le barème s’ajoute à l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement et de préavis » ;
o « l’indemnité issue du barème n’est pas exclusive de la réparation de préjudices distincts survenus à l’occasion du licenciement ».
A l’appui de ces éléments, la Cour conclut donc à la compatibilité du barème « Macron » avec l’article 10 de la Convention n°158 de l’OIT.
3) Les juges considèrent que ce barème ne contrevient pas à l’article 26 du Pacte relatif aux droits civils et politiques.
Sur ce point, la Cour retient que le barème « qui fixe une indemnité maximale en fonction de l’ancienneté du salarié, quel que soit le nombre de salariés dans l’entreprise, n’est pas discriminatoire, laissant une latitude au juge ». Les juges rappellent que seule l’indemnité minimale diffère selon la taille de l’entreprise « pour tenir compte de la structure économique de celle-ci et ne pas obérer son avenir économique », et précisent qu’en tout état de cause pour une ancienneté inférieure à un an, aucun indemnité minimale n’est fixée.
A l’instar des Cours d’appel de PARIS, de REIMS et de COLMAR, les juges d’appel de CHAMBERY se rangent ainsi à l’avis rendu le 17 juillet 2019 par la Cour de cassation.
Chambéry, Chambre sociale, 15 septembre 2020, nº 18/02305