Dans un arrêt en date du 26 octobre 2022 publié au bulletin, la Cour de cassation a cassé l’arrêt rendu par la Cour d’appel de PARIS qui avait jugé nul le licenciement du salarié, au motif que celui-ci était lié, selon la Cour d’appel, à son état de santé.
La chronologie était la suivante :
Par lettre des 13 et 20 novembre 2017, l’employeur avait convoqué le salarié à un entretien préalable à un licenciement.
Le 24 novembre 2017, le salarié avait transmis à l’assurance maladie une déclaration de maladie professionnelle et avait informé le 28 novembre 2017, son employeur de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle, et de ce qu’il avait pris attache avec la médecine du travail pour une visite de reprise.
Le 6 décembre 2017, l’employeur notifiait au salarié son licenciement pour motif économique.
Le 18 décembre 2017, le médecin du travail déclarait le salarié inapte à son poste de travail.
Par jugement du 25 février 2019, le Conseil de prud’hommes d’Evry, saisi d’une demande de nullité du licenciement, avait dit que le licenciement reposait sur un motif économique, condamné l’employeur à verser au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour absence de visite médicale périodique, et rejeté les autres demandes du salarié.
Par arrêt du 20 mai 2020, la cour d’appel de Paris avait infirmé le jugement et prononcé la nullité du licenciement, en condamnant l’employeur à payer au salarié des dommages-intérêts à ce titre. Pour entrer en voie de condamnation, la Cour avait jugé qu’ « au moment de la notification du licenciement le 6 décembre 2017, l’employeur était informé de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle par le salarié et de ce que le médecin du travail était saisi par celui-ci en vue d’une reprise, et que, dès lors, au moment de la notification du licenciement pour motif économique, l’employeur disposait d’éléments suffisants lui permettant de retenir que l’état de santé du salarié pourrait faire l’objet d’une inaptitude en lien avec l’activité professionnelle » de sorte « que le véritable motif du licenciement était lié à l’état de santé du salarié ».
Saisie d’un pourvoi formé par l’employeur, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel en jugeant qu’« en se déterminant ainsi, sans rechercher si la cessation d’activité de l’entreprise invoquée à l’appui du licenciement ne constituait pas la véritable cause du licenciement, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».
L’avocat général à la Cour de cassation a rappelé, aux termes de son avis, que s’il est admis que peuvent coexister un motif personnel et un motif économique de licenciement, les juges doivent rechercher le motif qui a été la cause première et déterminante de la rupture.
Face à deux causes légitimes de rupture, il appartient donc aux juges de rechercher, dès lors qu’elle est contestée, l’intention véritable de l’employeur lors de l’engagement de la procédure de licenciement d’une part et d’autre part, si cette cause véritable n’a pas eu pour effet d’éluder une protection et des droits spécifiques du salarié.
Au cas d’espèce, lors de l’engagement de la procédure, pendant son cours et à la date du licenciement, l’inaptitude du salarié n’était pas encore constatée d’une part ; d’autre part, l’existence d’une demande formée par le salarié auprès de la CPAM en reconnaissance d’une maladie professionnelle, ainsi que d’une demande formée auprès du médecin du travail d’organisation d’une visite médicale étaient des circonstances impropres à remettre en cause la légitimité et la réalité, à la date de l’engagement de la procédure, du motif économique de la rupture et impropres à établir une intention de l’employeur d’éluder le régime juridique de l’inaptitude.
L’affaire est renvoyée devant la Cour d’appel de Paris sur la nullité du licenciement et les dommages intérêts alloués pour nullité du licenciement.