Par un arrêt rendu le 22 novembre 2023 (Cass. soc., 22 novembre 2023, n°22-14.807), la Cour de cassation a rappelé que si une fédération syndicale pouvait agir en justice pour faire reconnaître l’existence d’une irrégularité de l’employeur et solliciter sa réparation, elle était irrecevable à solliciter une modification de la situation individuelle de salariés concernés par cette irrégularité.
En l’espèce, une fédération syndicale a assigné l’employeur devant le Tribunal Judiciaire, afin de faire constater que l’absence de perception d’une prime de 13e mois par certains collaborateurs constituait une inégalité de traitement par rapport aux salariés qui la percevaient et sollicitait la condamnation de l’employeur au versement, sous astreinte, de cette prime aux salariés jusqu’alors non concernés, outre la régularisation pour les années précédentes, dans la limite de la prescription triennale.
Les juges du fond ont rejeté les demandes formulées par la fédération syndicale, en jugeant son action irrecevable.
La fédération a alors formé un pourvoi en cassation, en considérant que « le syndicat peut agir en justice pour contraindre l’employeur à mettre fin à une situation illicite ».
La Haute juridiction, au visa de l’article L. 2132-3 du Code du travail, valide partiellement la décision des juges du fond en précisant que si un syndicat peut faire reconnaître en justice l’existence d’une irrégularité commise par l’employeur au regard des dispositions légales, règlementaires ou conventionnelles ou au regard du principe d’égalité de traitement, « il ne peut prétendre obtenir du juge qu’il condamne l’employeur à régulariser la situation individuelle des salariés concernés, une telle action relevant de la liberté personnelle de chaque salarié de conduire la défense de ses intérêts ».
Cependant, la Cour de cassation juge que l’intérêt à agir de la fédération syndicale « n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action et que l’action de la fédération, en ce qu’elle ne tendait pas à obtenir du juge qu’il condamne l’employeur à régulariser la situation individuelle des salariés concernés, était recevable ».
Autrement dit, la Haute juridiction opère une distinction entre l’intérêt à agir de la fédération syndicale dans l’intérêt collectif de la profession, relevant de ses attributions, et les demandes relatives à des situations individuelles pour lesquelles seuls les salariés concernés sont en mesure d’initier une action judiciaire individuelle à l’encontre de leur employeur.