La loi n° 2016—1088 du 8 août 2016, dite « loi Travail », a introduit plusieurs nouveautés relatives au constat de l’inaptitude physique et à la procédure de licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
En particulier, elle a ainsi prévu l’obligation pour l’employeur de consulter le Comité Social et Economique (CSE) sur les propositions de reclassement du salarié, que l’inaptitude de ce dernier soit d’origine professionnelle ou non.
Le manquement à cette obligation prive le licenciement de toute cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 30 septembre 2020, n° 19-11.974).
Depuis l’entrée en vigueur de la loi, le médecin du travail peut également mentionner expressément dans son avis d’inaptitude que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».
Une telle mention dispense l’employeur de son obligation de reclassement.
Mais le dispense-t-elle également de consulter le CSE sur l’impossibilité de reclassement du salarié ?
La question pouvait se poser dès lors que, sous l’empire des textes antérieurs, la Cour de cassation imposait à l’employeur de consulter les représentants du personnel même en cas d’impossibilité de reclassement, faute d’avoir pu identifier des postes susceptibles d’être proposés au salarié.
Elle n’était jusqu’alors pas tranchée par la Cour de cassation, et les Cours d’appel étaient divisées sur le sujet.
Ainsi, si plusieurs Cours d’appel ont pu considérer que l’absence d’information / consultation dans un tel cas ne remettait pas en cause le bien-fondé du licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, dès lors qu’une telle information / consultation est inutile dans cette situation (Riom, 4ème Chambre civile, 3 avril 2018, n°16/01261 ; Paris, Pôle 6, Chambre 4, 2 décembre 2020, nº 14/11428 ; Orléans, Chambre sociale, 13 avril 2021, nº18/03127 ; Limoges, Chambre sociale, 8 mars 2021, nº20/00162 ; Aix-en-Provence, Chambre 4-6, 9 avril 2021, nº19/18292 ; Versailles, 21ème Chambre, 17 février 2022, nº18/03695), d’autres ont au contraire retenu qu’il fallait informer et consulter le CSE « fût-ce simplement pour l’informer du contenu de l’avis du médecin du travail qui imposait de procéder au licenciement pour inaptitude du salarié » (Bourges, Chambre sociale, 18 juin 2021, nº20/00883). La Cour d’appel d’Amiens a également déjà statué dans ce sens (Amiens, 5ème Chambre prud’homale, 14 avril 2021, nº19/07875).
La position de la Cour de cassation était donc attendue. Elle est désormais connue.
Aux termes d’un arrêt rendu le 8 juin dernier, la Haute Juridiction a ainsi jugé que « lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi, l’employeur, qui n’est pas tenu de rechercher un reclassement, n’a pas l’obligation de consulter les délégués du personnel ».
Naturellement, cette décision, rendue dans une hypothèse où existaient toujours des délégués du personnel, est applicable à l’obligation de consultation du CSE.
Compte tenu des termes généraux utilisés par la Cour de cassation, elle s’impose également que l’inaptitude du salarié soit d’origine professionnelle ou non.
Publié au Bulletin, l’arrêt semble être destiné à une large diffusion.