Dans une affaire concernant un établissement de crédit, un cadre de haut niveau a été licencié pour faute grave pour des faits de harcèlement sexuel pour avoir envoyé des messages à connotation sexuelle à plusieurs de ses subordonnées (Cass. soc. 13 mars 2024 n°22-20.970). Dans ce contexte, son employeur, se basant sur le Code monétaire et financier (CMF), ne lui avait pas versé son bonus au motif qu’il avait manqué à ses obligations d’honorabilité.
Il convient, en effet, de préciser que l’article L. 511-84 du CMF prévoit que : « le montant total de la rémunération variable peut, en tout ou partie, être réduit […] lorsque la personne concernée a méconnu les règles édictées par l’établissement en matière de prise de risque, notamment en raison de sa responsabilité dans des agissements ayant entraîné des pertes significatives pour l’établissement ou en cas de manquement aux obligations d’honorabilité et de compétence ».
Aux termes de l’article R. 511-24 du CMF, les agissements susceptibles d’entraîner la réduction, en tout ou partie, de la rémunération variable sont définis par les établissements de crédit en considération notamment des pertes sérieuses qu’ils peuvent occasionner à ces établissements. L’objet de ce dispositif est, en effet, de prévenir les prises de risques excessives pouvant nuire à une gestion saine et efficace des risques de la part des salariés amenés à prendre des décisions d’investissement.
Le cadre en question a contesté en justice son licenciement et réclamé le versement de son bonus.
Il a obtenu gain de cause concernant sa demande de rappel de bonus. En effet, les règles d’honorabilité auxquelles le CMF fait référence s’entendent « de règles professionnelles en lien direct et étroit avec l’activité professionnelle d’investissement à risques ». En l’espèce, le règlement de la société du plan relatif aux rémunérations variables définissait un comportement professionnel à risque comme : « tout comportement dans le cadre des fonctions du bénéficiaire inapproprié et dommageable pour la société en violation avec la loi et ses filiales et ou les normes professionnelles applicables à l’activité du bénéficiaire sur la période d’acquisition (non-respect des règles de gouvernance, et ou de déontologie et ou des procédures) ». La Cour de Cassation, dans son arrêt du 13 mars 2024, valide le raisonnement des juges du fond qui ont considéré que le comportement inapproprié du cadre en question était « sans lien direct et étroit avec une activité professionnelle d’investissement à risques » (Cass. soc. 13 mars 2024 n°22-20.970). En effet, son comportement harcelant était étranger à cette activité de sorte que son employeur ne pouvait pas supprimer sa rémunération variable.
Le salarié a, en revanche, succombé sur le motif de son licenciement : la Haute Cour valide, en effet, la faute grave en raison des faits de harcèlement sexuel établis, et ce même si le salarié en question était « un excellent collaborateur n’ayant subi aucun reproche tout au long de sa longue collaboration » (Cass. soc. 13 mars 2024 n°22-20.970).