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Dispense de reclassement dans l’emploi ou dans un emploi : blanc bonnet, bonnet blanc ?

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Dans un arrêt en date du 12 juin 2024 (n°23-10.522), la Cour de cassation a eu l’occasion de statuer sur la portée d’un avis d’inaptitude mentionnant que l’état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement « dans l’emploi » et non dans « un emploi » comme prévu par l’article L. 1226-1 du Code du travail.

Cet article encadre, en effet, les hypothèses dans lesquelles l’employeur est dispensé de son obligation de reclassement en présence d’un avis d’inaptitude consécutif à une maladie ou un accident professionnel.

Il prévoit que l’employeur est dispensé de son obligation de reclassement lorsque le médecin du travail indique expressément dans son avis « que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé de salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

Essayant de tirer partie de la mention dans son avis d’inaptitude d’un obstacle à tout reclassement « dans l’emploi » et pas « dans un emploi », un salarié licencié pour inaptitude avec dispense de reclassement a saisi la Juridiction prud’homale afin de remettre en cause la légitimité de son licenciement et d’obtenir diverses sommes à ce titre.

La Cour d’appel, saisie de ce dossier, a fait droit à ses demandes, en retenant que la mention de « l’emploi », qui tend à viser l’emploi occupé précédemment ne peut être assimilée à « un emploi » qui suggère la référence à une généralité d’emplois, un salarié pouvant être inapte à un type d’emploi sans l’être nécessairement à tout emploi sauf indication expresse du médecin du travail en ce sens.

Elle en a déduit que l’avis de du médecin du travail n’était pas de nature à exonérer l’employeur de son obligation de reclassement, de sorte que le licenciement notifié était sans cause réelle et sérieuse, faute pour l’employeur d’avoir procédé à une recherche de reclassement.

A tort, selon la Cour de cassation qui, dans son arrêt du 12 juin 2024, a jugé qu’ « en statuant ainsi, alors qu’elle constatait que l’avis d’inaptitude mentionnait expressément que l’état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans l’emploi, ce dont il résultait que l’employeur était dispensé de rechercher et de proposer au salarié des postes de reclassement, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».

Cette solution est bienvenue, dans la mesure où il s’agissait vraisemblablement d’une simple erreur de plume du médecin lorsqu’il a recopié la mention prévue par la Loi.

Elle doit néanmoins amener les employeurs à être particulièrement vigilants s’agissant de la rédaction des avis d’inaptitude, afin de sécuriser les dossiers d’inaptitude avec dispense de reclassement et d’éviter de longs contentieux.

En effet, ce n’est pas la première fois que la Cour de cassation a à connaître de la question de la portée d’avis d’inaptitude ne reprenant pas stricto sensu les mentions prévues par le Code du travail.

Or, à ces occasions, elle a retenu que certains termes ajoutés par le médecin du travail dans son avis étaient de nature à réduire la portée de la dispense de reclassement.

Ainsi, il a été jugé que le fait pour le médecin du travail d’écrire « tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé » au lieu de « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » obligeait l’employeur à procéder à des recherches de reclassement et à consulter les délégués du personnel (Cass. soc., 13 septembre 2023, no 22-12.970).

Il a également été précisé que si l’avis précisait que l’état de santé faisait obstacle « sur le site » à tout reclassement dans un emploi, cela ne dispensait pas l’employeur, qui disposait d’autres établissements, de rechercher un reclassement hors de l’établissement auquel le salarié était affecté (Cass. soc., 13 décembre 2023, no 22-19.603).

La même solution a été retenue s’agissant d’un avis mentionnant que « l’état de santé fait obstacle à tout reclassement dans l’entreprise », alors que la loi vise plus généralement « tout reclassement dans un emploi », un tel avis n’étant pas de nature à dispenser l’employeur de rechercher un reclassement au sein du groupe (Cass. soc., 8 février 2023, nº 21-11.356).

La prudence reste donc de mise en présence d’un avis d’inaptitude qui comprend une mention ne correspondant pas strictement à celle de l’article L. 1226-1 du Code du travail, l’employeur ayant intérêt, dans cette hypothèse, à écrire au médecin du travail afin de faire préciser son avis et de sécuriser la procédure mise en œuvre.

https://www.courdecassation.fr/decision/66693a49532c0d0008221b27

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