Dans un arrêt du 11 octobre 2023, la Cour de cassation rappelle que :
– sauf abus, le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression et qu’il ne peut être apporté à celle-ci que des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché,
– l’abus est caractérisé par des termes injurieux, diffamatoires ou excessifs (Cass. soc. 11 octobre 2023, n° 22-15.138).
En l’espèce, une salariée avait été licenciée pour des griefs de remise en cause polémique des décisions de la société et de manque de respect à l’égard de la hiérarchie.
Pour juger que ces griefs étaient caractérisés, la Cour d’appel avait relevé que la salariée :
– avait manifesté un désaccord persistant malgré l’accord d’entreprise concernant les congés et les nombreuses réponses claires de l’employeur pour l’expliquer, ce qui avait eu un impact sur le fonctionnement de la société,
– avait volontairement refusé d’appliquer l’organisation en revendiquant des droits pour prendre ses congés non prévus dans l’accord d’entreprise, et ce de manière récurrente et insistante,
– s’était montrée particulièrement insistante envers son président sur la question des reports de congés alors qu’elle connaissait l’accord d’entreprise à ce sujet, ce qui ne l’avait pas empêchée de poser des ultimatums à son supérieur hiérarchique,
– qu’elle avait adopté un positionnement discutable vis-à-vis de son président comme en témoignait le courriel qu’elle lui avait envoyé le 20 décembre 2013 indiquant : « dans la mesure où j’ai pu, malgré de grandes réticences et incompréhensions, prendre mes congés je considère que l’incident est clos », après que ce dernier ait finalement accepté de déroger à l’accord d’entreprise concernant le report des congés sur l’année 2014.
La Haute juridiction a cassé l’arrêt de Cour d’appel pour manque de base légale au visa de l’article L.1121-1 du Code du travail aux termes duquel « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».
Elle rappelle qu’il résulte de ce texte que sauf abus, le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression et qu’il ne peut être apporté à celle-ci que des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché.
En s’abstenant de caractériser en quoi les propos tenus par la salariée comportaient des termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, les juges n’ont pas donné de base légale à leur décision.