Dans le cadre de la charge de la preuve, le salarié victime d’une discrimination en raison de son origine ne doit pas nécessairement faire la démonstration d’une différence de traitement entre lui et les autres salariés, ainsi qu’il ressort d’un arrêt de la Cour de cassation du 20 septembre 2023 (Cass. soc. 20 septembre 2023, n° 22-16.130).
En l’espèce, soutenant avoir subi un harcèlement moral et une discrimination en raison de son origine, la salariée a saisi la juridiction prud’homale, le 27 août 2017, de demandes tendant notamment au paiement de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral et de la discrimination.
La Cour d’appel avait retenu comme établis les propos répétés et inappropriés tenus par la supérieure hiérarchique de la salariée à son encontre à raison de son appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, mais l’avait déboutée de sa demande au titre de la discrimination à raison de ses origines aux motifs propres et adoptés qu’aucune différence de traitement ou mesure discriminatoire ne pouvait être retenue à l’égard de l’employeur.
La Cour d’appel avait retenu qu’il résultait des attestations produites que la supérieure hiérarchique de la salariée désignait parfois celle-ci, soit directement devant elle, soit en son absence, comme « la libanaise », mais que la salariée ne démontrait pas que ces propos, pour inappropriés qu’ils soient, aient entraîné une discrimination, c’est-à-dire une différence de traitement entre elle et les autres salariées.
La Haute juridiction, dans son arrêt du 20 septembre 2023, rappelle l’article L. 1134-1 du Code du travail aux termes duquel lorsque le salarié présente plusieurs éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Elle rappelle, en outre, que l’existence d’une discrimination n’implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d’autres salariés.
Au visa de l’article L. 1134-1 précité et de l’article L. 1132-1 qui définit les motifs discriminatoires, la Haute juridiction casse l’arrêt des juges du fond :
« En statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu’elle avait constaté que la salariée était désignée parfois, soit directement devant elle, soit en son absence, comme « la libanaise », ce qui constituait un élément laissant supposer l’existence d’une discrimination en raison de l’origine de la salariée, la cour d’appel a violé les textes susvisés » (Cass. soc. 20 septembre 2023, n° 22-16.130).
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Cass. soc. 20 septembre 2023, n° 22-16.130 :