Tout salarié a droit au respect de l’intimité de sa vie privée.
Il en résulte, selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, qu’un fait tiré de la vie personnelle du salarié ne peut pas, par principe, justifier son licenciement, sauf à caractériser un trouble objectif causé au bon fonctionnement de l’entreprise (Cass. Soc. 28 novembre 2018, n° 17-15.379).
S’agissant des relations amoureuses entre salariés, le Cour de cassation considère ainsi que le droit au respect de la vie privée interdit à l’employeur de licencier pour ce motif, sauf trouble dans l’entreprise. Dans cette hypothèse, le licenciement ne revêt toutefois pas un caractère disciplinaire.
Il n’en va autrement que lorsque les faits commis par le salarié dans le cadre de sa vie privée caractérisent un manquement à une obligation découlant de son contrat de travail.
Un arrêt rendu le 29 mai dernier illustre ce principe.
Dans cette espèce, un employeur avait licencié pour faute grave un salarié occupant des fonction de direction dans l’entreprise, au motif qu’il lui avait caché sa liaison amoureuse avec une salariée titulaire de mandats syndicaux et représentatifs.
Selon la Cour de cassation, un tel agissement constitue un manquement à l’obligation de loyauté justifiant le licenciement du salarié pour faute grave.
Il résultait en effet des constats réalisés par la Cour d’appel que :
- le salarié exerçait des fonctions de direction chargé en particulier de la gestion des ressources humaines (RH), et avait reçu du président du directoire diverses délégations en matière d’hygiène, de sécurité et d’organisation du travail ainsi que pour présider de manière permanente les différentes institutions représentatives du personnel ;
- Le salarié avait participé avec sa compagne à des réunions conjointes « sur des sujets sensibles » relatifs à des plans sociaux, le salarié en tant que représentant de la direction et la salariée en tant que représentante syndicale et du personnel, cette dernière s’étant en outre investie dans un mouvement de grève au sein de l’entreprise.
Dans un tel contexte, en dissimulant sa relation amoureuse avec la représentante syndicale, qui était en rapport avec ses fonctions professionnelles et de nature à en affecter le bon exercice, le salarié avait bien manqué à son obligation de loyauté à laquelle il était tenu envers son employeur :
« 5. La cour d’appel a constaté que le salarié, qui exerçait des fonctions de direction chargé en particulier de la gestion des ressources humaines et qui avait reçu du président du directoire de la société diverses délégations en matière d’hygiène, de sécurité et d’organisation du travail ainsi que pour présider, en ses lieux et place, de manière permanente, les différentes institutions représentatives du personnel, avait caché à son employeur la relation amoureuse qu’il entretenait, depuis la fin de l’année 2008, avec une autre salariée, laquelle, jusqu’à son départ de l’entreprise en avril 2013, y exerçait des mandats de représentation syndicale et de représentation du personnel, s’était investie en 2009 et 2010 dans des mouvements de grève et d’occupation d’un des établissements de l’entreprise et lors de la mise en œuvre d’un projet de réduction d’effectifs et avait participé en 2009 puis au cours de l’année 2012 et en janvier 2013, dans ses fonctions de représentation syndicale, à diverses réunions où le salarié avait lui-même représenté la direction et au cours desquelles avaient été abordés des sujets sensibles relatifs à des plans sociaux.
6. Elle a pu en déduire qu’en dissimulant cette relation intime, qui était en rapport avec ses fonctions professionnelles et de nature à en affecter le bon exercice, le salarié avait ainsi manqué à son obligation de loyauté à laquelle il était tenu envers son employeur et que ce manquement rendait impossible son maintien dans l’entreprise, peu important qu’un préjudice pour l’employeur ou pour l’entreprise soit ou non établi ».
https://www.courdecassation.fr/decision/6656c53b67f9f200081224b0