Dans une précédente actualité, nous nous étions interrogés sur les possibilités de recouvrement offertes à l’employeur en cas d’usage à des fins personnelles de la carte carburant par un salarié (ici).
La Cour de cassation, dans un arrêt du 8 novembre 2023, apporte de nouvelles précisions utiles (Cass. soc., 8 novembre 2023, n°22-10.384), jugeant que l’employeur peut obtenir le remboursement des sommes dans le cadre d’une action en répétition de l’indu (C. civ., art. 1302 et 1302-1).
En l’espèce, une salariée disposait d’un véhicule de service et d’une carte carburant. Licenciée pour faute grave au motif qu’elle avait utilisé tout au long des années 2014, 2015 et 2016 la carte carburant à des fins personnelles, la salariée a saisi le Conseil de prud’hommes aux fins de contester le licenciement.
Dans le cadre du contentieux, la Société a formé une demande reconventionnelle aux fins d’obtenir la condamnation de la salariée au remboursement de la somme de 7 300,86 euros correspondant aux dépenses de carburant engagées pour ses besoins personnels.
La Cour d’appel déboute l’employeur de cette demande au motif que le licenciement ayant été analysé comme dépourvu de cause réelle et sérieuse dans la mesure où les règles d’utilisation de la carte carburant et du véhicule de service n’avaient pas été notifiées à la salariée, ou trop tardivement, pour lui être opposables, aucun indu ne pouvait être constaté.
La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel. Elle rappelle que l’absence de faute de celui qui a payé ne constitue pas une condition de mise en œuvre de l’action en répétition de l’indu. Dès lors l’absence d’information ou l’information tardive quant aux règles d’utilisation de la carte carburant ne pouvait être opposée à l’employeur pour rejeter sa demande.
En conséquence, la Cour d’appel ayant constaté que l’employeur ne s’était engagé à prendre en charge que les dépenses de carburant à des fins professionnelles, et non celles réalisées à des fins personnelles pendant les jours de repos, les vacances, les jours fériés, ponts et fins de semaine, sa demande était recevable.
Seule la qualification de l’intention libérale de l’employeur aurait pu justifier le rejet de la demande (Cass. soc., 14 mars 2018, n°16-13.916 ; Cass. soc., 27 janvier 2016, 13-24.396).
Au regard de cette décision, il est conseillé de mentionner expressément, dans les documents contractuels, les conditions d’utilisation de la carte carburant afin d’éviter tout débat quant à une éventuelle utilisation personnelle.