Une modification du contrat de travail ne pouvant être imposée au salarié, l’employeur doit solliciter l’accord de l’intéressé lorsqu’il envisage de prononcer une rétrogradation disciplinaire, en l’informant expressément de sa faculté d’accepter ou de refuser cette mesure.
Lorsqu’il se heurte au refus du salarié, il peut alors, dans l’exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction aux lieu et place de la sanction refusée, y compris un licenciement pour faute grave, à condition d’organiser un nouvel entretien préalable s’il envisage de prononcer un licenciement.
Dans un arrêt du 14 juin 2023, la Cour de cassation s’est prononcée sur l’hypothèse dans laquelle le salarié avait indiqué accepter la rétrogradation proposée, tout en contestant dans le même temps le caractère disciplinaire de cette sanction.
Plus précisément, dans sa lettre en réponse, ce dernier indiquait accepter la mesure tout en contestant son caractère disciplinaire, évoquant des difficultés économiques ayant amené la Société à restructurer l’organisation en place.
La Cour de cassation valide le raisonnement retenu par la Cour d’appel selon lequel « les termes ambigus de cette lettre […] ne permettait pas de caractériser une acceptation claire et non équivoque ».
Elle en déduit que la Société pouvait prononcer une autre sanction, telle un licenciement.
La Haute juridiction censure néanmoins les autres dispositions de l’arrêt de la Cour d’appel ayant jugé cette mesure de licenciement fondée, aux motifs que :
“Vu l’article L. 1235-1 alinéa 3 du code du travail, dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :
9. Selon ce texte, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.
10. Pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, l’arrêt, après avoir relevé que les tableaux produits par l’employeur établissaient que les résultats des magasins dont le salarié avait la charge n’avaient pas connu d’amélioration postérieurement au 26 octobre 2016, et avaient même continué de se dégrader pour certains d’entre eux, retient qu’alors que l’employeur justifie lui avoir donné des instructions pour remédier aux difficultés constatées au premier semestre 2016, et en particulier aux mauvais résultats des magasins placés sous sa responsabilité, force est de constater que celui-ci ne justifie en rien des actions qu’il aurait mises en oeuvre à cet effet et souligne qu’aucun élément n’est apporté susceptible d’établir que le salarié, conformément à ce qui lui avait été demandé, aurait renforcé son contrôle sur les magasins dont il avait la charge, formalisé des instructions précises en direction des directeurs défaillants, notamment quant aux procédures à respecter, ou mis en oeuvre des plans d’action susceptibles de remédier aux difficultés constatées.
11. Il en déduit que le salarié a manqué à ses obligations en s’abstenant de mettre en oeuvre les préconisations de son employeur.
12. En statuant ainsi, la cour d’appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé“.
C’était donc “trop beau” pour l’employeur concerné…
D’ailleurs, comment peut-on lui reprocher de ne pas avoir apporté la preuve que son salarié n’avait rien fait, alors que justement celui-ci était licencié pour son inaction persistante, après avoir été alerté sur la nécessité d’y remédier en raison des mauvais résultats des magasins dont il avait la responsabilité ??
On attend les précisions de la Cour de cassation sur cette preuve négative qui est exigée, en plus, de l’employeur.