Dans un arrêt publié du 1er février 2023 (n°21-24.271), la Cour de cassation précise l’étendue du contrôle que doit opérer le juge des référés lorsqu’il est saisi par un salarié dont la rupture du contrat de travail est consécutive au signalement d’une alerte (Loi n°2016-1691, modifiée, 9 déc. 2016, art.12).
Le juge des référés doit :
- apprécier si les éléments qui lui sont soumis permettent de présumer que le salarié a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime, ou qu’il a signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi « Sapin II » ; et,
- dans l’affirmative, rechercher si l’employeur rapporte la preuve que sa décision de licencier est justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de ce salarié.
Cet arrêt est l’occasion de rappeler la particulière vigilance dont doivent faire preuve les employeurs lorsqu’ils décident de licencier un salarié à l’origine d’une alerte, ou un salarié « facilitateur » ayant aidé le lanceur d’alerte (Loi n°2016-1691, modifiée, 9 déc. 2016, art.6-1), compte tenu du statut protecteur dont ils bénéficient (C. trav., art. L.1132-3-3).
En effet, toute mesure prise à leur égard en méconnaissance de cette protection est nulle (C. trav., art. L.1132-4 ; Loi n°2016-1691, modifiée, 9 déc. 2016, art.10-1), ce qui est susceptible de faire courir un risque financier particulièrement élevé à l’employeur, sans compter les éventuelles peines d’amende et peines complémentaires (Loi n°2016-1691, modifiée, 9 déc. 2016, art.13 et 13-1).
Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt commenté, une salariée avait lancé une alerte, dont le juge des référés avait relevé la bonne foi, qui avait donné lieu à une enquête du comité éthique. Ce dernier avait conclu à l’absence de situation contraire aux règles et principes éthiques le 20 février 2020.
Dès le 13 mars 2020, la salariée avait été convoquée à un entretien préalable. Elle avait finalement été licenciée par courrier du 27 mai 2020 à raison de l’incidence sur les conditions de travail des difficultés relationnelles qu’elle rencontrait avec ses collaborateurs, pairs et supérieurs.
Au cas particulier, la concordance des temps avec la fin de la procédure d’alerte peut constituer un indice de la violation du statut protecteur, ce que devra confirmer, ou non, la Cour d’appel de renvoi.
En pratique, il peut être discuté le fait de débuter une procédure de licenciement à l’encontre d’un salarié bénéficiant du statut de lanceur d’alerte tout juste quelques semaines après que l’alerte ait été « classée » par le service compétent, surtout lorsque le point de départ des faits reprochés remonte à plusieurs années comme cela était le cas en l’espèce.
https://www.courdecassation.fr/en/decision/63da1185b78bc005de6ccd13