En application de l’article L. 2511-1 du Code du travail, « l’exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié ».
Pour rappel, la faute lourde se distingue de la faute grave en ce qu’elle révèle une intention de nuire à l’employeur ou à l’entreprise, et ne peut être excusée par les circonstances.
Le Code du travail précise qu’en l’absence de caractérisation d’une telle faute, le licenciement d’un gréviste est « nul de plein droit ».
Du fait de cette nullité, le salarié peut prétendre à sa réintégration, celle-ci pouvant, le cas échéant, être ordonnée par le juge des référés, compétent pour faire cesser le trouble manifestement illicite résultant du licenciement (Cass. Soc. 26 septembre 1990, n° 88-41.375). Il peut, dans cette hypothèse, bénéficier en outre d’une indemnité égale au montant de la rémunération qu’il aurait dû percevoir entre son éviction et sa réintégration, même s’il a éventuellement perçu un salaire ou un revenu de remplacement durant cette période (Cass. Soc. 25 novembre 2015, n° 14-20.527).
En l’absence de réintégration, le salarié a droit :
- A l’indemnité de licenciement, l’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés ;
- A une indemnité à la charge de l’employeur, qui ne peut pas être inférieure aux salaires des 6 derniers mois (Art. L. 1235-3-1).
Mais, en toute hypothèse, l’employeur peut-il en sus être condamné à rembourser au Pôle Emploi les allocations chômage perçues par le salarié entre son licenciement et sa réintégration dans les effectifs ?
A ce sujet, l’article L. 1235-4 du Code du travail dispose :
« Dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé ».
Dans un arrêt rendu le 18 janvier 2023, la Cour de cassation a jugé que cette disposition était applicable aux licenciements prononcés à l’encontre de salariés grévistes en l’absence de caractérisation d’une faute lourde (Cass. Soc. 18 janvier 2023, n° 21-20.311) :
« 7. Aux termes de l‘article L. 1235-4 du code du travail, dans sa version issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.
8. Selon l’article L. 1132-4 du code du travail, dans sa version antérieure à la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022, toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul.
9. L’article L. 1132-2 du code du travail, figurant dans le même chapitre II « Principe de non-discrimination », prévoit qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire mentionnée à l’article L. 1132-1 en raison de l’exercice normal du droit de grève.
10. Il en résulte que les dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail sont applicables en cas de nullité du licenciement en raison de l’exercice normal du droit de grève.
11. Dès lors, la cour d’appel qui, ayant retenu que le licenciement du salarié était nul comme consécutif à l’exercice par ce dernier de son droit de grève, sans qu’une faute lourde puisse lui être reprochée, a condamné la société à rembourser à Pôle emploi les allocations de chômage versées au salarié entre la date du licenciement et le jugement dans la limite de trois mois d’allocations, n’encourt pas le grief du moyen ».
La prudence est donc de mise en cette période de conflits sociaux.