Par un arrêt publié, du 9 mars 2022, la chambre sociale de la Cour de cassation juge qu’en présence d’un accord collectif prévoyant que les consultations récurrentes ressortent au seul comité social et économique central (CSEC), le Comité social et économique d’établissement (CSEE) n’a pas compétence pour procéder à la désignation d’un expert dans le cadre de ces consultations (Cass. soc., 9 mars 2022, n° 20-19.974).
Par principe, conformément à l’article L.2316-20 du Code du travail, le CSEE est doté des mêmes attributions que le Comité social et économique d’entreprise, dans la limite des pouvoirs confiés au chef d’établissement. À cet égard, lorsqu’il est compétent, le CSEE peut faire appel à un expert dans les mêmes conditions que le CSE d’entreprise (C. trav., art. L.2316-21).
S’agissant des consultations récurrentes, l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 a ouvert la possibilité aux négociateurs de définir, par accord d’entreprise, les niveaux auxquels elles sont conduites (C. trav., L.2312-19). À défaut d’accord, l’article L.2312-22 fixe de manière supplétive le niveau de consultation et, au cas particulier de la consultation relative à la politique sociale de l’entreprise, aux conditions de travail et à l’emploi, prévoit que la consultation est conduite à la fois au niveau central et au niveau des établissements lorsque sont prévues des mesures d’adaptation spécifiques à ces établissements.
Dans l’arrêt commenté, la Cour de cassation était invitée à se prononcer sur la question de savoir si, en présence d’un accord réservant les procédures d’information et consultation récurrentes au CSEC, le CSEE demeurait compétent pour désigner un expert dans le cadre de l’une de ces consultations.
En l’espèce, un accord d’entreprise en date du 28 novembre 2018 prévoyait que les procédures d’information et consultation récurrentes relatives à la politique sociale de l’entreprise, la situation économique de l’entreprise et les orientations stratégiques de l’entreprise relevaient de la compétence exclusive du CSEC.
Par une délibération du 4 mars 2020, le CSEE avait décidé du recours à une expertise en vue de la consultation sur la politique sociale de cet établissement. L’employeur sollicitait alors, devant le juge judiciaire, l’annulation de cette délibération.
Le Tribunal judiciaire avait débouté l’employeur de sa demande au motif notamment qu’ « en l’absence d’accord prévoyant des dispositions spécifiques en terme de périodicité des consultations et de faculté pour le CSEE de solliciter des expertises, celui-ci a la faculté de désigner un expert sur la politique sociale qui est conduite au niveau de l’entreprise comme au niveau de l’établissement ».
La Haute juridiction casse ce jugement et considère qu’en application de l’accord collectif, « les consultations récurrentes ressortaient au seul comité social et économique central de la société de sorte que le comité social et économique de l’établissement ne pouvait procéder à la désignation d’un expert à cet égard ».
Très récemment, au sujet du recours à l’expertise en cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important, la Cour de cassation avait déjà jugé que le CSEE ne pouvait faire appel à un expert « que lorsqu’il établit l’existence de mesures d’adaptation spécifiques à l’établissement » (Cass. soc., 16 février 2022, n° 20-17.622).