Aux termes d’une décision rendue le 7 octobre dernier, la plus haute juridiction administrative a jugé que la branche a toute latitude pour définir ce que contient le salaire minima hiérarchique. Elle a ainsi donné raison aux partenaires sociaux dans une affaire qui les opposaient au Ministère du Travail.
A cet égard, il convient de rappeler que l’une des ordonnances du 22 septembre 2017 (dites « ordonnances Macron ») a réorganisé l’articulation entre les accords de branche et les accords d’entreprise.
Ainsi, désormais :
- L’accord de branche prévaut dans une série de domaines limitativement énumérés (« bloc 1 »), parmi lesquels les « salaires minimas hiérarchiques ». Dans ces domaines, l’accord d’entreprise ne peut trouver à s’appliquer que lorsqu’il assure des garanties au moins équivalentes ;
- Dans d’autres domaines (« bloc 2 »), les partenaires sociaux ont toute latitude pour décider si les stipulations de branche prévalent ou non ;
- Les accords d’entreprises peuvent déroger aux stipulations des accords de branche dans tous les domaines qui ne relèvent ni du bloc 1, ni du bloc 2. Cela concerne notamment les primes et accessoires du salaire.
Dans ce cadre, les partenaires sociaux de la branche du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire ont fixé les salaires minima hiérarchiques (SMH) applicables dans la branche par avenant signé le 31 mai 2018.
Celui-ci prévoyait notamment que l’assiette du SMH intégrait une prime de fin d’année, et la rémunération du temps de pause.
Par arrêté du 5 juin 2019, la ministre du travail a étendu l’application de cet avenant à l’ensemble des entreprises de la branche – y compris donc à celles qui n’étaient pas adhérentes à l’une des organisations ayant signé l’avenant – mais exclu du champ de cette extension la stipulation particulière selon laquelle les SMH intégraient des accessoires de salaire.
Selon le ministère, en effet, permettre aux branches professionnelles d’intégrer des compléments de salaire dans l’assiette du minimum conventionnel constituerait un empiètement sur la négociation d’entreprise.
A tort, selon le Conseil d’Etat.
La plus haute juridiction administrative, dans sa décision du 7 octobre 2021, a ainsi décidé que « les signataires d’un accord de branche ont la possibilité de définir la structure du SMH et de prévoir qu’il s’applique à la rémunération effective du salarié, incluant le salaire de base et certains compléments de salaire ».
Pour le juge, cette possibilité n’est pas une entrave à la négociation d’entreprise dans la mesure où elle ne fait pas obstacle « à ce que le montant de ces minima soit atteint dans une entreprise par des modalités de rémunération différentes de celles [que la convention branche] mentionne, un accord d’entreprise pouvant réduire ou supprimer les compléments de salaire qu’elle mentionne au titre de ces minima, dès lors toutefois que sont prévus d’autres éléments de rémunération permettant aux salariés de l’entreprise de percevoir une rémunération effective au moins égale au montant des salaires minima hiérarchiques fixé par la convention ».