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Loi relative à la gestion de la crise sanitaire : la question de la suspension du contrat de travail des salariés en CDI : première analyse.

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Loi relative à la gestion de la crise sanitaire : la question de la suspension du contrat de travail des salariés en CDI : première analyse.

 

L’article 1er de la loi n° 2021-1049 du 5 août 2021 a prévu l’obligation, à compter du 30 août 2021, de présenter un passe sanitaire pour les salariés et agents publics intervenant dans certains lieux, établissements, services (activités de loisirs, restauration, foires, etc).

 

Le salarié devant travailler dans l’un de ces secteurs doit donc :

 

  • présenter le résultat d’un examen de dépistage virologique négatif ;
  • ou justifier de son statut vaccinal ;
  • ou disposer d’un certificat de rétablissement.

 

Lorsque les salariés concernés ne sont pas en mesure de justifier du passe sanitaire, le législateur a prévu la possibilité pour ces derniers, en accord avec leur employeur, de prendre des jours de repos conventionnels ou des jours de congés. A défaut, l’employeur leur notifie « la suspension de son contrat de travail (…) qui s’accompagne de l’interruption du versement de la rémunération, qui prend fin dès que le salarié produit les justificatifs requis ».

 

La mise en place de cette suspension, qui intervient « le jour même » du contrat de travail, emporte de nombreuses interrogations.

 

La loi se contente de prévoir que lorsque la suspension « se prolonge au-delà d’une durée équivalente à trois jours travaillés, l’employeur convoque le salarié à un entretien afin d’examiner avec lui les moyens de régulariser sa situation, notamment les possibilités d’affectation, le cas échéant temporaire, au sein de l’entreprise sur un autre poste non soumis à cette obligation ».

 

Le législateur reste muet sur les modalités de cet « entretien ». L’employeur doit-il adresser au salarié concerné une convocation formelle ? Le contenu de l’entretien devra-t-il être retranscrit pour matérialiser sa tenue ? A ce jour, ces questions restent en suspens. La prudence commande d’adresser une convocation au salarié pour un entretien dès le 4e jour de suspension de son contrat de travail. Si les dispositions légales ne précisent pas les modalités de convocation, il nous semble nécessaire de le faire par écrit à des fins probatoires (ce que confirme le “questions/réponses”). A noter que le protocole sanitaire prévoir pour sa part que cet “entretien a lieu au plus tard dans un délai de trois jours travaillés suivant la suspension” ce qui n’est pas respectueux de la lettre du texte de loi.

 

Par ailleurs, il est permis de s’interroger sur l’étendue de cette « pseudo » obligation de reclassement et les risques pesant sur l’employeur récalcitrant. Le texte se contente en effet d’imposer à l’employeur de rechercher « les possibilités d’affectation (…) au sein de l’entreprise sur un poste non soumis à l’obligation ». Le protocole sanitaire évoque la mise en place du travail à distance lorsque cela est possible.

 

Or, il semblerait que cette obligation ne soit qu’une obligation de moyen à la charge de l’employeur, et non une obligation de résultat.

 

Par ailleurs, on peut s’interroger sur le risque pesant sur l’employeur qui ne procèderait pas à cet entretien, ou n’effectuerait aucune démarche de bonne foi en vue d’une nouvelle affectation pour le salarié dont le contrat serait suspendu. Sur ce point, le législateur est tout aussi muet et n’a assorti cette obligation d’aucune sanction.

 

Dans l’absolu, le salarié concerné pourrait saisir le Conseil de prud’hommes en invoquant un manquement de l’employeur à son obligation de loyauté. Eu égard aux délais applicables devant les juridictions prud’homales et au caractère temporaire du dispositif (le passe étant imposé en l’état jusqu’au 15 novembre 2021), l’intérêt d’une telle procédure apparaît relativement vain, sauf à agir devant la formation de référé (à supposer que les conditions du référé soient réunies, ce qui ne va cependant pas de soi).

Au demeurant, quand bien même un juge prud’homal ferait droit à la demande d’un salarié, les sommes potentiellement allouées sembleraient limitées au salaire qu’il aurait pu percevoir si l’employeur l’avait affecté à un poste ne nécessitant pas de passe sanitaire. Encore faut-il que le salarié soit en mesure de démontrer que l’employeur disposait d’un poste disponible sur lequel il aurait pu l’affecter.

 

En synthèse, la suspension du contrat de travail du salarié ne disposant pas de passe sanitaire reste particulièrement floue à ce jour et le projet de protocole sanitaire qui a circulé ces derniers jours n’apporte guère plus de précisions…

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