Dans un arrêt récent, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a cassé une décision des juges du fond qui avaient retenu la responsabilité pénale d’une société exploitant un restaurant, en se bornant à énoncer uniquement que les faits délictueux reprochés à cette personne morale (en l’occurrence l’infraction de pratique commerciale trompeuse) avaient été commis par le président de cette société l’exploitant depuis 2011 (Cass. crim. 9 mars 2021, n°20-83.304).
Pour censurer cette décision, la Haute juridiction, au visa de l’article 121-2 du Code pénal, a relevé que la Cour d’appel n’avait pas déterminé par quel organe ou représentant de la société les manquements qu’elle avait constatés avaient été commis pour le compte de celle-ci.
En effet, en application de cet article 121-2 du Code pénal, une personne morale ne peut être déclarée responsable pénalement que s’il est établi :
- qu’une infraction a été commise par l’un de ses organes (à savoir les personnes auxquelles la loi ou les statuts confient la mission d’assurer l’administration ou l’organisation de la personne morale) oureprésentants (exemple : le titulaire d’une délégation de pouvoirs valablement consentie),
- et que cette infraction l’a été pour le compte de cette personne morale (c’est-à-dire dans son intérêt).
Toujours dans l’arrêt du 9 mars 2021, la Cour de cassation a censuré la décision des juges du fond ayant rejeté l’exception de nullité prise de la présence d’une équipe de télévision équipée d’une caméra lors du contrôle effectué dans le restaurant par les services de l’administration, en l’occurrence ceux de la Direction départementale de la protection des populations.
La Haute juridiction a rappelé qu’il résultait des articles 11 (sur le secret de l’enquête pénale) et 28 du Code de procédure pénale « que les agents ou fonctionnaires auxquels les lois spéciales mentionnées à [cet] article 28 attribuent des pouvoirs de police judiciaire sont soumis au secret de l’enquête. La présence d’un tiers ayant obtenu d’une autorité publique l’autorisation de capter, par le son ou l’image, fût-ce dans le but d’informer le public, le déroulement des actes d’enquête auxquels procèdent ces agents ou fonctionnaires, constitue une violation de ce secret. Une telle violation porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée ».
Ce faisant, les juges du fond ne pouvaient alors écarter l’exception du nullité soulevée à l’encontre notamment du procès-verbal du contrôle, aux motifs que leur auteur « qui procède non à des enquêtes mais à de simples contrôles qui n’aboutissent que rarement à des poursuites, mais plus souvent à de simples avertissements ou à des transactions, de sorte que si la discrétion est souhaitable, le contrôle fait en présence de caméra ne viole ni le secret de l’enquête ni aucune forme prescrite par la loi à peine de nullité » et que la société concernée ne « justifiait d’aucun grief tiré de la forme des constatations puisque le procès-verbal du contrôle, mené exclusivement sur pièces et documents, ne s’appuyait sur aucun élément testimonial qui aurait pu être dicté par l’émotion due à la présence d’une caméra ».
Nul doute que cette décision pourrait intéresser en cas de contrôle sur site des services de l’inspection du travail, en présence d’une équipe de médias.
Une solution similaire a déjà été retenue à l’égard d’une perquisition menée par des organes de police ou de justice, en présence d’un journaliste, qui a été annulée (Cass. crim. 9 janvier 2019, n°17-84.026).
Nous vous proposons d’en parler à l’occasion de la Masterclass sur les contrôles de l’inspection du travail dans l’entreprise organisée avec LIAISONS SOCIALES le 14 avril 2021, en présence d’un représentant de l’Administration du travail.
https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_criminelle_578/214_9_46609.html