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Limites à l’exercice du droit de grève précisées par la Cour de cassation

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Limites à l’exercice du droit de grève précisées par la Cour de cassation

Par Me Marine MUSA, avocat MGG Voltaire

 

Aux termes d’un arrêt du 10 février 2021 (n°19-14.021), la Cour de cassation rappelle notamment le principe selon lequel « les représentants du personnel et les représentants syndicaux peuvent, tant durant les heures de délégation qu’en dehors de leurs heurs habituelles de travail, circuler librement dans l’entreprise et y prendre tous contacts nécessaires à l’accomplissement de leur mission, notamment auprès d’un salarié à son poste de travail, sous réserve de ne pas apporter de gêne importante à l’accomplissement du travail des salariés.

 

La liberté de circulation des représentants du personnel et des représentants syndicaux au sein de l’entreprise est un principe d’ordre public, qui ne peut donner lieu à restrictions qu’au regard d’impératifs de santé, d’hygiène ou de sécurité ou en cas d’abus. Elle s’exerce de la même façon en cas de mouvement de grève ».

 

En l’espèce, ont été jugés abusifs et de nature à constituer un trouble manifestement illicite les comportements suivants : comportements apportant une gêne anormale au travail des salariés et à la clientèle d’un hôtel par usage de mégaphones et de sifflets dans les couloirs de l’hôtel, interpellation des salariés non-grévistes, distribution de tracts aux clients, entrée de force dans une chambre occupée.

 

Par conséquent, les restrictions provisoires imposées par l’employeur consistant, dans un premier temps, dans l’interdiction d’accès à l’hôtel, puis, après quelques jours, à conditionner l’accès (entrée sans sifflets, ni mégaphone, ni chasubles ; contact à distance par un membre de la direction ou de la sécurité, interdiction d’entrée dans les chambres d’hôtel sans autorisation) étaient justifiées et proportionnées aux abus constatés.

 

Il convient de rappeler que les juges condamnent également les mouvements collectifs répondant initialement à la définition de la grève, mais dégénérant en abus en raison des circonstances dans lesquelles ils sont exercés.

 

Il y a, en particulier, abus du droit de grève lorsque celle-ci entraine ou risque d’entrainer la désorganisation de l’entreprise elle-même (Cass. soc. 11 janvier 2000, n°97-18.215) et non de sa seule production (Cass. soc. 18 janvier 1995, n°91-10.476 ; Cass. soc. 25 janvier 2011, n°09-69.030).

 

De même, l’occupation des lieux de travail constitue un trouble manifestement illicite lorsqu’elle entrave gravement la liberté du travail, notamment si l’accès à l’usine est interdit au directeur et au personnel non-gréviste (Cass. soc. 21 juin 1984, n°82-16.596).

 

En revanche, l’occupation des lieux de travail ne constitue pas un acte abusif dans les hypothèses suivantes :

 

  • lorsqu’elle est symbolique, bénigne et très mouvementée, et qu’aucune entrave n’est apportée par les grévistes à la liberté du travail (Cass. soc. 26 février 1992, n°90-40.760) ;

 

  • lorsqu’elle n’est accompagnée d’aucun fait de dégradation du matériel, de violence, de séquestration ou autre comportement dangereux à l’égard des personnels se trouvant sur le site (Cass. soc. 9 mars 2011, n°10-11.588).

 

Par ailleurs, le piquet de grève, qui consiste en un regroupement des salariés grévistes devant l’entrée de l’entreprise en vue d’inciter les non-grévistes à cesser le travail, est licite s’il n’entraîne pas la désorganisation de l’entreprise et n’entrave pas la liberté du travail.

 

Lorsque le piquet de grève aboutit au blocage des portes de l’établissement, et par conséquent à l’interdiction de l’accès de l’usine aux autres salariés, l’exercice anormal du droit de grève est caractérisé.

 

Le durcissement de la grève peut également entraîner certains comportements individuels ou collectifs constitutifs d’atteintes aux personnes ou aux biens, étant précisé qu’en application de l’article L.2511-1 du Code du travail, seule une faute lourde peut justifier le licenciement d’un salarié gréviste.

 

La faute lourde peut notamment résulter de l’entrave à la liberté du travail, d’actes de violence sur les biens ou les personnes ou d’une violation des règles de sécurité au cours d’un grève.

 

Ainsi, le salarié qui participe à la séquestration du DRH pendant le mouvement de grève commet une faute lourde justifiant son licenciement (Cass. soc. 2 juillet 2014, n°13-12.562).

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/215_10_46438.html

 

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